Landes & traditions

Les échassiers

C'est l'image d'Épinal par excellence du département des Landes…

Avant leur réaménagement en forêt de pins, intervenu sous Napoléon III, les Landes n'étaient constituées que de vastes étendues d'une platitude infinie, uniquement parsemées de hautes broussailles et de marais difficilement accessibles.

Pouvoir surveiller leurs troupeaux s'avérant vital pour les bergers y paturant l'usage des échasses, ou « escasses » en patois landais, s'est imposé au fil du temps. D'une longueur moyenne de 1,4 m, ces échasses permettaient aux bergers d'avoir une vue plus étendue sur l'ensemble de leurs bêtes.

L'équilibre sur les échasses demeurant par nature précaire, les bergers s'attachaient grâce à des sangles, généralement réalisées en cuir.

Toutefois, lors des déplacements ces sangles occasionnaient des frottements dont la répétition pouvait entraîner diverses plaies. S'en protéger de façon efficace nécessitait l'utilisation de guêtres, aussi appelées en patois « garnaches », que les échassiers tricotaient la plupart du temps sur place durant la garde des moutons.

Complément indispensable des échasses, le bâton demeure essentiel pour permettre au berger de tenir la position verticale. En effet, l'assise offerte par les échasses s'avère par nature trop étroite pour conserver cette position sans devoir piétiner sans cesse. Accessoirement, ce bâton permettait de monter ou descendre plus facilement en offrant à l'échassier un appui temporaire lui venant en aide.

Bien que travaillant en climat tempéré, les bergers landais n'en avaient pas moins besoin de se protéger par tous les temps. Il portaient pour cela une veste réalisée en peau de mouton, dont l'épaisseur les mettait à l'abri des intempéries de façon efficace.

Dernier équipement de l'échassier, le « cuyoun » était une gourde réalisée à partir d'une courge séchée, offrant au berger le moyen de s'hydrater durant la garde de ses troupeaux.

Tradition séculaire attachée au mode de vie des bergers d'antan, les échasses ne sont plus utilisées aujourd'hui autrement que par les différents groupes folkloriques chargés de maintenir vivante cette partie du patrimoine landais.

La course landaise

Disposant de sa propre fédération, trop souvent confondue avec la corrida, la tradition des courses landaises est incontournable pour qui veut comprendre l'esprit festif animant les villes et les villages de ce département du Sud-Ouest.

A contrario de sa cousine hibérique, la course landaise n'a lieu qu'avec des vaches appelées « coursières » en lieu et place des taureaux. Par ailleurs, il n'y a jamais de mise à mort de l'animal à l'issue de la représentation.

Seules sont recherchées les sensations fortes, consistant à « écarter » devant la vache ou sauter au dessus d'elle, éventuellement à pieds joints, après s'être lié les chevilles.

Se passant dans des arènes, reprenant une partie des codes vestimentaires de la corrida, la course landaise est considérée comme un sport et reconnue comme tel, la seule finalité consistant à montrer son courage devant des spectateurs massés sur les gradins.

Même s'il ne s'agit pas de taureaux, la vivacité des vaches landaises est largement reconnue. Pour un « écarteur » l'objectif consiste donc à provoquer visuellement l'animal jusqu'à ce que la vache se décide à foncer sur l'intrus. S'écarter au dernier moment en rasant les cornes requiert un solide sang froid et une grande expérience de la part des écarteurs. Le coup de corne susceptible de laisser quelques meurtrissures n'est jamais très loin…

Les « sauteurs » quant à eux doivent avoir des qualités de gymnastes dans la mesure où, comme leur nom l'indique, leur prestation consiste à laisser venir l'animal puis effectuer un saut par dessus au dernier moment. Il va sans dire que l'appréciation des distances et l'aptitude à sauter haut sont deux qualités essentielles chez eux.

Derniers acteurs présents dans l'arène, les « cordiers » offrent une protection aux autres intervenants en déviant, si cela s'avère nécessaire, la coursière avec pour règle que toute action du cordier doit se faire sans gêner l'écarteur ou le sauteur, ni diminuer la qualité de son action.

Le code vestimentaire est édicté par la fédération en charge des courses landaises et comprend : un pantalon blanc, un gilet, une chemise blanche, une cravate et une ceinture. Cette tenue est par ailleurs complétée d'un boléro pour les écarteurs.

Au même titre que les ganaderias des courses taurines, chargées de fournir les taureaux qui officieront dans l'arène et animeront les corridas, différents éleveurs de vaches landaises se sont spécialisés localement dans l'élevage et la mise à disposition du bétail spécialement préparé pour ces courses. Le terme francisé de « ganadéria » est généralement utilisé pour les désigner et ils doivent répondre à un cahier des charges très strict édicté par la fédération pour pouvoir prétendre participer à des courses landaises.

Les vaches landaises n'ayant pas à subir le sort funeste d'un taureau au sortir des arènes, celles-ci accumulent au fil des ans une expérience rendant de fait plus difficiles les écarts et sauts.

Bien que les accidents graves soient relativement rares, un certain nombre d'écarteurs ou sauteurs landais et plus généralement gascons ont laissé leur vie dans l'exercice de leur passion. Une trentaine d'entre eux a ainsi péri dans l'arène depuis que les règles de la course landaise ont été codifiées.

Afin de limiter autant que possible les risques, les vaches pesant plusieurs centaines de kilos et lancées à près de 50 km/h ont leur cornes dotées d'un embout (corne dite « emboulée »), destiné à réduire l'impact lors des chocs (« tumades »).

Pour en savoir plus sur les risques traumatologiques encourus durant une course landaise, le lecteur pourra utilement se référer à la thèse rédigée par Carla Girod, parue en 2017 sous le titre « Course landaise: étude rétrospective d’un an sur les traumatismes déclarés en compétitions organisées par la FFCL. ». Ce document est diponible en ligne sous la référence umas-016271233.

La chasse à la palombe

Frappant le département des Landes et plus généralement le Sud-Ouest vers la fin du mois d'octobre, une étrange pathologie dénommée « Maladie bleue » ou encore « Palombite » entraîne l'absentéisme d'un certain nombre de résidents locaux.

Durant cette période finissant vers la fin du mois de novembre, demandes de congés voire arrêts maladie fleurissent dans les entreprises, tous avec la même origine : la migration des palombes et la ruée des chasseurs vers leurs résidences secondaires établies en forêt.

Dénommées « palombières », il s'agit de cabanes plus ou moins élaborées dans lesquelles nos chasseurs guettent le passage des palmipèdes susnommés et essaient de garnir leur gibecière avec plus ou moins de succès.

Les plus lucides vous avouerons sans peine que l'obtention du meilleur tableau de chasse n'est pas une finalité en soi et que l'aspect convivial de la chose, le plaisir de se retrouver entre« potes », est bien souvent la vocation première d'une palombière.

Pâtés, saucissons et grillades sont mis à l'honneur par nos chasseurs sans oublier, bien évidemment, la délivrance de boissons à teneur en alcool plus ou moins élevée, mais toujours servies avec largesse. C'est un fait bien connu : le grand air, ça creuse…

Oiseau migrateur, la palombe s'apparente par son aspect au pigeon commun et traverse le Sud-Ouest en direction des Pyrénées par vagues successives. Tout l'art de cette chasse consiste donc à attirer les volatiles migrateurs pour qu'ils se posent au sol et deviennent des cibles plus abordables d'une part, de futures conserves d'autre part, sous réserve que l'apéritif pris à la palombière n'ait pas altéré de façon définitive la vue de nos chasseurs.

Pour attirer les palombes, il est d'usage de positionner sur les branches entourant la palombière un certain nombre « d'appeaux », c'est à dire des palombes précédemment capturées et apprivoisées qui, en s'agitant lorsqu'on fait bouger les potences sur lesquelles elles sont positionnées vont retenir l'attention de leurs congénères en cours de migration.

Afin d'attirer un nombre maximum de palombes, il n'est pas rare que les cabanes constuites par les chasseurs soient multiples et reliées entre elles par un réseau de galeries réalisées avec des branchages. Celles-ci sont destinées à cacher les tireurs à l'affût.